« Mark VI ». Cette appellation quelque peu énigmatique a une résonance particulière pour une catégorie particulière de musiciens : les saxophonistes. Il ne s'agit ici ni d'un extrait d'Évangile, ni d'un modèle de voiture et encore moins d'une bombe atomique, mais bien d'un saxophone devenu légendaire, développé par la firme française Henri Selmer.
Breveté en 1846 par notre Adolphe Sax (1814-1894) national, le saxophone est fabriqué par divers facteurs dès l'extinction, en 1866, de son brevet d'invention. Si la firme Selmer ne commercialise son premier modèle propre qu'en 1922 (le « modèle 22 »), elle entretient toutefois un lien particulier avec l'inventeur de l'instrument : c'est en effet elle qui, en 1928, rachète la maison Adolphe Sax, alors dirigée par son fils Adolphe-Édouard.
Le nom du modèle - « Mark VI » - fait référence au sixième modèle développé intégralement par Selmer, créé pour célébrer le 50e anniversaire de la médaille d'or obtenue par la firme lors de l'Exposition universelle de Saint-Louis en 1904. Différents musiciens participent à sa mise au point, dont le grand saxophoniste français Marcel Mule. Sa production s'est étendue de 1954 à 1975 et a couvert les différents registres, du sopranino au basse. Fabriqué en France, il a aussi été assemblé dans l'usine du groupe Selmer aux États-Unis.
Le Selmer Mark VI est considéré par beaucoup comme le meilleur saxophone jamais construit et il jouit aujourd'hui du statut d'icône dans le petit monde du saxophone. Le design et le mécanisme du Mark VI marquent une étape importante dans l'évolution du saxophone et sont, pour une grande part, toujours d'actualité aujourd'hui. Grâce à son ergonomie, sa légèreté, sa justesse, la souplesse de son jeu, sans oublier son timbre, le Mark VI a rapidement été plébiscité tant par les saxophonistes classiques que par les jazzmen. C'est cependant davantage dans le jazz que l'instrument a acquis ses lettres noblesses, avec quelques grands noms - comme Stan Getz, Ornette Coleman, Wayne Shorter, John Coltrane ou Lee Konitz - faisant office de locomotives. Quand Selmer a sorti ses modèles suivants, le « Mark 7 » et le « Super Action 80 », beaucoup de musiciens ont préféré garder leur bon vieux Mark VI. Aujourd'hui, les magasins spécialisés, les maisons de ventes, les collectionneurs et, bien entendu, les musiciens recherchent encore des spécimens authentiques comme celui acquis par le mim.
Ce saxophone, acquis grâce à un don des Amis du mim, est un alto en mi bémol, en laiton vernis. Son numéro de série indique qu'il a été fabriqué en 1969. On note le « S » de Selmer positionné de manière typique sur la clef d'octave, ainsi que la marque du modèle, située sur la virole séparant la culasse du pavillon.